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Interarchitecturalité

Еn littérature

L’image du monde s’apparente à celle de l’édifice, de la maison, du bâtiment, lhomme et le monde étant subjugués à la fluidité de la métaphore spéculaire à la Renaissance. Il y revient à propos de son château à l’époque des guerres de religion, en décrivant l’état désastreux toujours en parallèle époustouflant : “La liaison et contexture de cette monarchie et ce grand batiment ayant ete demis et dissout, notamment sur ses vieux ans, par elle (la nouvellete) donne tant qu’on veut d’ouverture et d’entrée a pareilles injures. » (I, 23). Gray signale la vivacité de l’image du bâtiment, ce qui contribue à l’incorporation de la métaphore quand Montaigne a “acheve quelque pan de mur ” et rangé “quelque piece de bastiment mal dole” (III, 9).  Nous dirions que sa présence transversale dans le texte est  interarchitecturale  à cause de l’interférence entre le château réel et le château littéraire.  Les interférences entre le réel et l’imaginaire qui explicitent les naissances de l’esprit rendent transparent le miroir entre le dedans et le dehors pour ce phénomène interarchitectural, qui traduit en mise en abyme l’enchâssement du monde intérieur et du monde extérieur. C’est ainsi que l’âme incorpore les affects de l’esprit, transposant le réel dans l’imaginaire afin d’atteindre une vivacité qui se plie à tous les changements grâce à son essence fluide: “Le corps n’a, sauf le plus et le moins, qu’un train et qu’un pli. Elle (l’âme) est variable en toute sorte de formes, et renge a soy, et a son estat, quel qu’il soit, les sentiments du corps et tous autres accidents”. (I,14) p 139

Les Essais eux-mêmes évoquent dans leur contenu la forme architecturale au second degré. C’est dans ce sens que nous pouvons parler d’un niveau interarchitectural dans l’appréhension de l’œuvre de Montaigne. Si on empruntait la configuration du signe de Hjelmslev on pourrait voir le texte comme une tour vivante qu’évoque la couverture de l’édition londonnienne du XVIIème siècle de l’œuvre.  Grâce à cet élément architectural sur le frontispice, le livre apparaît comme une hiérarchie de signifiants, se spatialise.

Traduction en français

The Interartistic Phenomenon through Montaigne’s Essays, Peter Lang, Bern, 2018, p 216

Reproduction de la couverture de l’édition londonnienne des Essais de Montaigne, Michel Eyquem de Montaigne, “The Essays”, 3ème édition, London, 1632.

En architecture

Le splendide intérieur de l’église en fait une œuvre d’art exemplaire, où tous les arts s’entremêlent. Les années 1230-1240, particulièrement fécondes en termes de créativité architecturale innovante, marquent la naissance du style gothique rayonnant. L’épanouissement de l’activité artistique à cette époque s’exprime dans la polychromie des sculptures et des médaillons de la Sainte Chapelle, ainsi que dans les vitraux. D’une manière générale, on observe un goût pour la miniaturisation des formes, ce qui a conduit certains artistes à qualifier l’art de cette période de “maniériste”. Cette tendance est particulièrement vraie pour l’architecture, dont les apparences affectent véritablement tous les arts. Au XIIIe siècle, l’architecture s’intègre plus que jamais à la peinture. L’un des exemples les plus éloquents est sans doute le Psautier de Saint-Louis, dont les miniatures sont remplies de frontons, de roses et de flèches provenant directement de chantiers contemporains. Outre le système d’encadrement des miniatures, on retrouve des motifs architecturaux sur un certain nombre de coffrets en or. La fascination est telle que l’on parle aujourd’hui d'”architecturalisation” des arts. La juxtaposition de l’architecture du Reliquaire et de l’église révèle une interarchitecturalité.

Traduction en français

  • Texte présenté à l’Institut de Littérature – Académie Bulgare des Sciences, Forum scientifique: ‘Métamorphoses littéraires – entre la vie et le texte’, 16 mai 2022, Vassilena Kolarova, “L’Interarchitecturalité dans la sémiotique de la Sainte-Chapelle”.

La Sainte-Chapelle de Paris, la Chapelle haute, vue vers le chœur et la Grande châsse

L’interlittéralité est une variété du phénomène interartistique lorsque l’art interagit avec la littérature.

Les sculptures d’Antoni Gaudí dans la basilique de la Sagrada Familia sont naturelles et expressives. Sur le portail de la Nativité, on trouve des sculptures de la Sainte Famille, avec le Saint Nom de Jésus, ce qui est une référence à la Bible ; Deo – Dieu, le texte est tissé dans la pierre, ce qui le rend interlittéral, car l’architecture interagit avec un texte écrit. C’est ce qui nous permet de considérer l’œuvre comme interartistique, intersculpturale et interarchitecturale. En outre, il y a les sculptures des anges musiciens, de sorte que cette symphonie de pierre devient intermusicale. Les fleurs et les plantes imitent une peinture calquée sur les vitraux, dont les couleurs multidimensionnelles à l’intérieur complètent la vision de notre siècle numérique dans un mouvement interpictural.

Groupes de sculptures sur la façade de la Nativité de la Sagrada Familia à Barcelone

Les villes d’art comme Rome, Florence et Venise contiennent en elles-mêmes la Bible, comme une incarnation de la beauté. La grâce du dôme de Michel-Ange recrée la pensée Divine.: « 11 Or la foi est la garantie des biens que l’on espère, la preuve des realités qu’on ne voit pas. C’est elle qui a valu aux anciens un bon temoignage. 10 C’est qu’il attendait la ville pourvue de fondations dont Dieu est l’architecte et le constructeur.», La Bible de Jérusalem, Hébreu 11:10. Elles expriment l’essence de l’idée interartistique, étant créées en suivant les pas du Créateur.

The Interartistic Phenomenon through Montaigne’s Essays, Peter Lang, Bern, 2018, ISBN‏: ‎ 978-3034333177, p. 204, p. 262

Façade principale et dôme de la basilique Saint-Pierre, vus de la place Saint-Pierre à Rome

Dans le cadre du paragone des arts à la Renaissance, Michel-Ange tient ce propos :

Le parfait artiste ne peut concevoir aucune image qui ne soit déjà dans l’enveloppe du marbre, mais seule sait l’en extraire la main docile à l’esprit.

Michel-Ange, Sonnet, L’Ottima artista, Poésies/Rime, Les Belles Lettres, 2004