Les paysages sonores

La musique et la peinture

Kandinsky était enivré des jouissances, des émotions, de leur force, il avait bien senti que la musique s’exprimait par le son dans la durée, que ceci permettait à celui qui l’écoutaiit de se laisser aller à son imagination en totale liberté, et que en conséquence évidente, la peinture abstraite pouvait, elle seule aussi, offrir un champ infini à l’imaginaire, à ses richesses. Elle nous permet de laisser résonner et exulter notre “sonorité intérieure”. Le grand désir est de rapprocher la peinture à la pureté de la musique, car il se met à retrouver aussi l’appréhension “temporelle” de la peinture.

Composition VII, 1913

Peinture à l’huile/plaque,

200 x 300 cm (6′ 6 3/4″ x 9′ 11 1/8″) ;

Galerie Tretiakov, Moscou

  • L’interpicturalité dans la sémiotique de l’art, Aracne editrice, Rome, 2019

ISBN‏: ‎ 978-8825521108, p. 1115-116

  • Texte présenté à la Session of the Annual Central South-East Seminar in Semiotics at the New Bulgarian University at Sofia, presentation of the text “The Intersemiotic Sonority of the Theory and the Drawings of Kandinsky “, April 2003

Le langage plastique

Nous cherchons plutôt le “contenu” abstrait qui change d’apparence selon le point de vue spécifique de celui qui regarde le tableau.  Selon Göran Sonnesson dans ” Notes sur la Macchia de Kandinsky, Le problème du langage plastique”, http://www.arthist.lu.se/kultsem/sonesson/, qui établit l’autonomie du langage plastique, celui-ci est riche de sens parce qu’il apporte quelque chose de plus au langage iconique. C’est une idée qu’il développe dans son livre ” Pictorial concepts”, Chartwell-Brat Publishing & Training Ltd, psychological methodology, 1989. Le langage plastique est capable de transformations multiples dans les deux sens – forme-contenu et contenu-forme. Sonnesson estime qu’un signe plastique exprime un sens même s’il est intrinsèquement une expression de la forme. S’il se manifeste dans des images multiples, comme chez Kandinsky, un signe plastique peut prendre le caractère d’un contenu. C’est une question d’interprétation personnelle. En peinture, comme dans les autres arts, nous ne pouvons pas savoir quelle sera la véritable réalité artistique lorsque deux contenus intertextuels se rencontrent et peuvent se référer au même objet. (Wildgen, Wolfgang, “Cross-cultural dynamics of picture and text”, Contribution à la table ronde organisée par Martina Plümacher à Lyon 2004.doc), Cela dépend uniquement de notre interprétation. Elle peut être littéraire (figurative) ou picturale (abstraite) et donc interartistique ou aussi interpicturale. Le signe plastique sera répété dans deux ou plusieurs tableaux et on parlera d’interpicturalité lorsque deux ou plusieurs tableaux sont juxtaposés.

Composition IX, 1936

Peinture à l’huile/toile,

113,5 x 195 cm (44 5/8 x 76 3/4 )

Musée national d’art moderne,

Centre Georges Pompidou, Paris

  • Texte présenté à 75th ACFAS Congress, Trois-Rivières University, in cooperation with Students Forum of the Interdisciplinary Research Centre, edition 2007, 7 May 2007, Seeing the Text, Reading the Image: the Intermediality in Work/« Voir le texte, lire l’image : de l’intermédialité à l’œuvre”, Exploring the Interartistic Boundaries/Explorer les frontières interartistiques, “Kandinsky’s Interpictural Compositions/« Les Compositions interpicturales de Kandinsky”, New Bulgarian University, Canada

https://www.ledevoir.com/societe/science/142185/75e-congres-de-l-acfas-l-excellence-pour-une-region

L’interférence du texte et de l’image

L’interférence texte/image peut être étudiée en termes de perception purement mentale, puisque Peirce décrit les pensées comme des signes. Interprétant la conception de l’art abstrait de Peirce, Nöth oppose sa théorie de l’iconicité, notamment celle de l’icône pure (signe inséparable de son objet, au point d’en devenir irréel) en contraste par rapport a l’hypôicone (signe similaire).  Il traduit en exemple les peintures de Malevitch. En ce sens, un tableau de Kandinsky peut être interprété de multiples façons et se déploie en toute une constellation de perceptions mentales, réelles ou imaginaires, c’est l’interpicturalité en peinture, selon l’interprétation qu’on lui donne. C’est pourquoi Nöth conclut que les tableaux abstraits sont des signes complexes.

Composition IV, 1911

Peinture à l’huile/plaque,

159,5 x 250,5 cm (62 7/8 x 98 5/8 )

Kunstsammlung Nordrhein-Westfallen,

Düsseldorf

            La révélation

Si le monde est un livre, il peut aussi être un tableau. Le microcosme de la Création et la puissance créatrice de l’art apparaissent dans le tableau qui donne la révélation de l’artiste qui a inventé la peinture abstraite en 1908 à Munich: “C’était au crépuscule. Je rentrais chez moi avec ma boîte à peinture après une étude, encore plongé dans mes rêves et perdu dans mes pensées sur le travail que je venais de terminer, quand soudain j’ai vu un tableau d’une beauté ineffable, plein d’une extraordinaire charge intérieure. Je suis resté un moment indifférent, puis je me suis dirigé vers ce tableau étrange sur lequel je ne voyais que des formes et des couleurs et dont le sujet était incompréhensible. Soudain, je découvris le mystère : il s’agissait d’un de mes tableaux, accroché au mur à l’envers. Le lendemain, j’ai essayé, à la lumière du jour, d’éprouver la même sensation devant le tableau de la veille. Mais je n’y suis parvenu qu’à moitié : même à l’envers, je pouvais reconnaître les objets, mais il manquait la lumière subtile du coucher de soleil. J’avais alors compris que le sujet nuisait à mes peintures.” Kandiinsky, Wassily, “Regards sur le passé”; traduction J.-P. Bouillon, Editions Hermann, 1974, p.169, cité par Alain Bonfand, “L’Art abstrait”, PUF, Paris, 1994. L’idée de l’abstraction a progressivement mûri dans le monde spirituel de Kandinsky. Sa peinture est passée par de nombreuses étapes, naviguant entre l’abstrait et le figuratif, avant et après la création de son premier tableau abstrait en 1910. Le moment de sa création est encore controversé. Kandinsky dit avoir peint son premier tableau abstrait en 1911. Est-ce parce qu’il s’agit d’une aquarelle en 1910, un genre mineur, plutôt que d’une peinture à l’huile comme pour celui de 1911?

  • «La révélation» L’interpicturalité dans la sémiotique de l’art, Aracne editrice, Rome, 2019

Aracne editrice – ISBN‏: ‎ 978-8825521108

Les Compositions

Les “Compositions” sont l’expression d’états intérieurs. Elles ont été réalisées lentement et avec prétention entre 1910 et 1936. Elles reflètent un moment culminant dans la recréation de la peinture abstraite pure. L’objectif de Kandinsky était d’établir une communication spirituelle entre le spectateur et l’artiste à travers des formes pures. Les formes sont le fruit du spirituel, qu’il considérait comme l’aspect le plus important de toute œuvre d’art. Le terme “composition” a une relation interartistique avec le terme “musique” et “architecture” également, comme le suggère Zheleva-Martins, Dobrina., “Tectonics as a Theory of Form and Formation”, Academic Publishing House “Prof. Marin Drinov”, Sofia, 2000, p. 37. La composition au sens large revêt une signification hautement interartistique pour les arts et les sciences en général. Eero Tarasti  analyse le mouvement des images dans la musique au sein de Composition VIII étudiée dans l’ouvrage critique “Musique et arts visuels, Images et promenades – une excursion peircienne dans la sémiose de Moussorgski “, p.215-p.215 et aussi X ” Toward the modern scene ” 10.1 Debussy’s Impressionism in the Prelude “…La terrasse des audiences du clair de lune “, p.267 in ” A Theory of musical semiotics “, Indiana University Press, Bloomington and Indianapolis, USA, 1994.

Composition VI,

The Flood, 1913.

Oil painting/canvas,

194,9 x 300 cm

Hermitage Museum, Saint Petersburg

  • «The revelation», L’interpicturalité dans la sémiotique de l’art, Aracne editrice, Rome, 2019, ISBN‏: ‎978-8825521108, p. 108, p. 113

The Compositions

The “Compositions” are the expression of inner states. They were produced slowly and meticulously between 1910 and 1936. They reflect a culminating moment in the recreation of pure abstract painting. Kandinsky’s aim was to establish a spiritual communication between the viewer and the artist through pure forms. Forms are the fruit of the spiritual, which he considered to be the most important aspect of any work of art. The term ‘composition’ has an interartistic relationship with the term ‘music’ and ‘architecture’ too, as Zheleva-Martins Dobrina suggests., “Tectonics as a Theory of Form and Formation”, Academic Publishing House “Prof. Marin Drinov”, Sofia, 2000, p. 37. Kandinsky was intoxicated by the emotional power of music. Music expresses itself through sound in time, allowing the listener to give free rein to his or her imagination. Only abstract painting is capable of such suggestion. The representation of the visible world cannot convey the feeling itself. Music responds most directly to the call of the “inner sound”. The desire to bring painting closer to the purity of music is probably also expressed in the search for a ‘temporal’ perception of painting. Composition in the broadest sense has a highly interartistic significance for the arts and sciences in general. Eero Tarasti analyses the movement of images in the music of Composition VIII, studied in the critical work “Music and the Visual Arts, Images and Walks – A Peircian Excursion into Mussorgsky’s Semiosis”, p.215-p.215 et aussi X ” Toward the modern scene ” 10.1 Debussy’s Impressionism in the Prelude “…La terrasse des audiences du clair de lune “, p.267 in ” A Theory of musical semiotics “, Indiana University Press, Bloomington and Indianapolis, USA, 1994.

Composition VIII, 1923

Peinture à l’huile/plaque,

140 x 200,1 cm

Solomon R. Guggenheim,

New York

L’interférence intermusicale et interpicturale est manifeste en peinture.

  • « L’interférence intermusicale et interpicturale », dans L’interpicturalité dans la sémiotique de l’art, Aracne editrice, Rome, 2019, p. 115-118.

Aracne editrice – ISBN‏: ‎ 978-8825521108